Oser la Singularité

22/11/2018

 

L’une est un peu ébréchée, les autres légèrement écartées. Est ce si grave ? Regardez bien autour de vous, on ne voit plus tellement ce type de sourires personnels, différents, uniques qui émaillent nos souvenirs. « L’esthétique du sourire » a frappé, alignant nos dents à force d’orthodontie (dont le nom porte en lui même une certaine rigidité non ?), les blanchissant et dans les cas « extrêmes » limant celles qui dépasseraient un peu trop, pour les ranger par-fai-te-ment. Nos sourires se ressemblent, se standardisent. Ce clin d’œil dentaire, est peut être moins anecdotique qu’il ne semble.

En fait, cette standardisation lisse tout, nos systèmes et nos organisations. Sur le plan vestimentaire, un nouvel uniforme est né, La Tendance : mères et filles s’habillent pareil au Comptoir des Cotonniers, pères et fils chez Father &Son, les couples eux, iront chez The Kooples. Nous adoptons des « éléments de langage » propres à nos éco-systèmes, certains parleront d'"agilité", ailleurs vous entendrez de nombreux "changement de paradigme", les entrepreneurs eux, "pivotent".

Attention cette standardisation, peut nous priver de nos savoirs distincts et pourrait conduire à une forme d’assujetissement. Cette question me titille vous l’aurez compris, alors comme Claude Sautet le disait :

« Plus l’univers se standardise, plus la singularité m’intéresse ».

 

Singulière singularité, voilà une notion typiquement « border line ».

Bien sûr elle exprime quelque chose autour de l’unicité, de l’originalité, la qualité de ce qui appartient à un seul individu, mais ça ne me suffit pas.

Du côté des sciences exactes, elle désigne des lieux précis où les propriétés observées diffèrent fortement des propriétés alentour. En mathématiques, une singularité est un point où un objet mathématique n’est pas bien défini : par exemple, un point où une courbe dispose de plusieurs tangentes. Un peu dedans, un peu dehors. Et vous, n'avez vous jamais ressenti cette impression d'être à la fois dedans, dans la structure familiale, amicale, professionnelle et en même temps un peu dehors ?

Comme coach, c'est le champs des sciences humaines que je vais creuser. Et quand on pose la question de la singularité sous l’angle de l’individualité, comment ne pas s'intéresser au processus d’individuation qui conduit justement à l’individu ?

 

L'individuation, ou comment faire tomber les masques

C'est à K.G. Jung que l'on doit cette notion "la prise de conscience qu'on est distinct et différent des autres, et l'idée qu'on est soi-même une personne entière, indivisible". Une construction en 3 phases :

1 : Je rentre dans le moule, je m'adapte voire me sur-adapte.

Accommodation autour de règles du jeu le plus souvent extérieures, les règles du système d'appartenance. On peut passer des années à développer cette compétence de sur-adaptation, à être toujours exactement celui ou celle qui est attendu, en famille, à l'école, en cours de récréation, en sport, au boulot.

2 : Aïe! ça commence à coincer.

Je ne me retrouve pas complètement. Les 1ères fissures apparaissent sur les masques, qui permettent ce regard de l'extérieur vers l'intérieur. Dans mon cas ce sont mes enfants adolescents qui ont fait apparaître les limites de ce fonctionnement là, me renvoyant un manque de cohérence et d'authenticité.

3 : Le face à face

Bas les masques, je suis appelée à l’intérieur vers un questionnement qui laisse émerger ce qui a été enfoui.

On perçoit bien ici cette notion d'ajustement intérieur/extérieur que l'on retrouve totalement dans la question de l'inclusion de l'individu dans son système. Ce qui pose évidemment la question de la souplesse du système : le système est-il un système qui formate, dans lequel les membres ne peuvent s'inscrire qu'en adoptant les codes du dit système, ou laisse-t-il un peu de souplesse à l'expression de l'individu ? Prenez 2'' et regardez autour de vous, dans vos propres systèmes, vos familles, vos entreprises, vos réseaux...

 

Attention, singularité n’est pas différence 

La singularité n’est pas la recherche de la différence à tout prix. Dans la quête de la différence il est question de s'opposer à un système, de se positionner en dehors, de s'en exclure. Et donc de construire son identité par opposition à une norme, mais finalement c'est bien cette norme que l'on utilise pour se définir !

 

Adoptetoi.com

Etre singulier c’est se situer par rapport à soi, tracer son sillon, son propre sillon, à partir de ses caractéristiques structurantes et le plus souvent enfouies. C'est oser rencontrer ses zones d'ombre, oser ce face à face sincère, authentique. C'est s'accueillir, s'adopter. Si j'osais je lancerais un nouveau site de rencontres : Adoptetoi.com

Merci Raphaël Enthoven de cette façon de présenter le métier du coaching lors d'une conférence chez nos confrères Talentis :

"Les coachs sont des exhausteurs de singularité"

Je suis en effet convaincue que plus l'individu est conscient de sa singularité et en capacité de l'assumer, mieux il se déploie dans le système, dans une réelle fluidité relationnelle, prenant véritablement sa place. Il construit alors sa légitimité ce qui vient nourrir l'estime qu'il a de lui.

 

Alors, prêts à oser votre singularité ?